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lundi 25 mai 2015

"L'Orientale" de Nine Moati, (suite de "Les Belles de Tunis" et "Rose d'Alger")


"L'Orientale" Nine Moati (Ed. du Seuil)

Quatrième couverture :
     Hannah hérite à la mort de son père, le duc Nessim, héros burlesque de Livourne du siècle dernier, une fortune colossale. Elle relance l'activité du port, scandalise sa ville, la quitte pour suivre, jusqu'à Tunis, un Anglais fasciné par l'Orient. Mais John Lewis se dérobe. Hannah s'installe à Paris en 1900 et transforme son hôtel particulier de la place Vendôme en palais des Mille et Une Nuits. Elle y attend, en Orientale, l'homme aimé. En vain. Son amour déçu et sa sensualité la poussent alors dans les bras du bel Armand de La Fresnaye, antisémite comme tant d'autres à l'époque. Cette relation la dégrade jusqu'au dégoût d'elle-même. Une fois encore, elle réagira... Cloîtrée dans son palais comme dans un harem, Hannah créé une salle de jeux et devient banquière. Paris en fait une de ses reines. Des silhouettes défilent : Poiret, Citroën, Chanel... L'Orientale, recluse de la place Vendôme, assiste ainsi à un demi-siècle d'événements qui fracassent le monde et bouleversent les destins. Dans la lignée des Belles de Tunis, Nine Moati nous offre le portrait d'une femme moderne dans ses contradictions et ses passions, transfigurée, pour le désir et le rêve, en sublime et romanesque    " Orientale ".

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     "L’Orientale", c’est Hannah, l’héritière d’une fortune amassée par le Duc Nessim, personnage vu dans  « Les Belles de Tunis » premier tome de la saga racontant l’Histoire avec un grand H de la Tunisie, depuis le temps des Beys. 


Le Palais Nessim et vue de sa terrasse sur Tunis 
     Ce n'est pas un personnage de fiction, mais le chef de la communauté juive de Tunis, qui a joué un rôle important dans l'Histoire de la Tunisie de la fin du XIXe siècle.

     Nous sommes au début du XXe siècle, Hannah, après le décès de son père Nessim, à Livourne, se retrouve seule, sans famille.  Comme lorsque l’on est à la tête d’une grande fortune, beaucoup de gens gravitent autour d’elle, pour lui présenter les condoléances et espérer mettre en avant les jeunes hommes, tout à fait prêts à l’épouser, enfin à épouser sa fortune, elle le sait très bien. Mais, elle refuse d’être traitée comme une bête qu’on vante au marché aux bestiaux !  



« Elle écarta le rideau de fine dentelle, entrouvrit la fenêtre pour respirer l’air de la mer et se laver intérieurement avant d’affronter le monde. La mer, en cet automne naissant et frémissant, atteignait à cette couleur violette qu’elle aimait. » [p. 11] 
     En femme douée pour les affaires, digne fille de son père, elle tentera avec des idées nouvelles, de relancer l’activité du port de Livourne. De nombreux français s'installent sur ces terres du Maghreb, des mangeurs de porc, qui ne trouvent pas les salaisons et autres charcuteries préparées à base de ces animaux, proscrits par la religion musulmane et juive ! Qu'à cela ne tienne, elle organisera le transport et la transformation sur place de ces animaux pour satisfaire cette nouvelle demande.

     Pour mener sa vie de femme, elle a bien envie de s’attacher aux pas d’un artiste peintre, John Lewis, un Anglais fasciné par l’Orient. Elle lui propose, de lui faire découvrir Tunis. Ils s’embarquent sur un des bateaux de sa compagnie. Une occasion pour elle, de faire connaissance avec la ville de ses origines, et peut-être de sa cousine Myriam. Un retour aux sources de sa famille.

     N’étant pas arrivée à ce dont elle avait rêvé, avec ce peintre, elle décide d'aller s'installer à Paris. 
« ...
-    je pense aller aussi à Paris, reprit très vite Hannah pour changer de conversation.

- A Paris ? Ne craignez-vous pas demanda Mochée, la vague d’antisémitisme qui s’abat depuis le début de cette malheureuse affaire  Dreyfus ? Nous avons beaucoup craint, ici même, pour le sort de notre communauté. … » [p. 123] 
     Dans un hôtel particulier de la place Vendôme que son père "le Duc Nessim" avait acheté spécialement pour elle, au temps de sa splendeur. Pour tenter de surprendre son peintre, s'il revenait vers elle, son hôtel particulier devient un "Palais des Mille et Une Nuits", au début, juste un lieu où aimaient se retrouver quelques uns de ses amis artistes, puis petit à petit, prisé du tout Paris, mais dans lequel elle décidera de vivre cloîtrée, toujours habillée  « à l' Orientale », tout en gérant ses affaires d’une main de maître. 

Place Vendôme, Paris, 1900
Mon avis

     Nine Moati  retrace la vie parisienne de ce début de siècle. Au fil des pages, de grands artistes croiseront sa vie, Modigliani ...
     Les grandes affaires politiques seront évoquées, mais aussi la crise que révélera l’affaire Dreyfus.  L’antisémitisme sévit déjà, mais comme pour prendre une revanche sur ces hommes, elle fera de son palais, une salle de jeux, et une banque. Ils ne pourront se passer d’elle, et Paris en fera une de ses reines, combien de ses personnalités défilent dans ses murs : Poiret, Citroën, Chanel … 
     L’Orientale, qui vit cloîtrée chez elle, comme dans un harem, verra de ses fenêtres, un demi-siècle de l’histoire du monde bouleverser les destins. Jusqu’au jour où elle sait qu’elle devra sortir, et ne refusera pas de faire face à son destin, fièrement.

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Pour en savoir plus
Edition du Rocher, 
ISBN : 9782268050485
Date de parution : 1985 (de nouvelles éditions en juillet 2005)
252 pages – 
Prix :18.20 € T.T.C.

1 commentaire:

  1. Dans les romans de Nine Moati, c'est mon favori! Très belle critique!

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